Gestion du temps judiciaire :

Projet de lignes directrices sur le respect du délai raisonnable par les experts judiciaires

La CEPEJ prépare actuellement avec son groupe de travail SATURN un projet de lignes directrices sur le respect du délai raisonnable par les experts judiciaires.

L’EEEI a été appelée à donner son point de vue sur un premier texte dont il apparaît qu’il s’appliquerait uniquement aux experts judiciaires désignés par un tribunal ce qui exclurait de son champ d’application les trois pays qui ne connaissent que des experts judiciaires désignés par les parties et une partie des procédures qui se déroulent dans 36 pays dont le système judiciaire connait à la fois des experts nommés par un tribunal et des experts désignés par les parties.

Ces lignes directrices ici brièvement résumées touchent tout à la fois :

  • la sélection de l’expert pour laquelle ce dernier doit limiter sa demande d’inscription aux seules rubriques de la nomenclature pour lesquelles il a une véritable connaissance professionnelle ;
  • la formation qui doit porter sur les principes directeurs du procès, le respect du délai raisonnable mentionné à l’article 6-1 de la CEDH ainsi que sur l’animation de groupe et la gestion des conflits ;
  • le choix de l’expert pour lequel l’expert doit renseigner le juge sur sa charge de travail, être rapide pour accepter ou refuser la mission, prêter un serment qui mentionne expressément le devoir de diligence et de célérité ;
  • la mission qui peut être allégée dans les affaires simples, redéfinie dans les affaires complexes lors d’une première réunion au cours de laquelle le calendrier sera évoqué ;
  • la conciliation qui, si elle intervient, doit être signalée sans délai au juge ;
  • les délais d’exécution qui doivent être respectés lorsqu’ils auront été fixés sauf demande de prorogation ;
  • l’exécution de la mesure pour laquelle l’expert devra prendre en compte les accords passés entre les compagnies d’experts et les ordres d’avocats pour la fixation des délais de convocation, fixer un calendrier prévisionnel lors de la première réunion en tenant compte des délais optimaux pour la définition des différentes phases, informer le juge de l’avancement des travaux et dans les plus brefs délais des difficultés rencontrées.
  • l’avis de l’expert qui doit répondre à toutes les questions posées et seulement à celles-ci au besoin après la rédaction d’un pré-rapport dont l’utilisation est vivement encouragée pour obtenir les observations des parties.
  • l’allègement du rapport qui ne doit comporter que les pages utiles à la solution du litige et se trouver expurgé des pièces qui sont connues du tribunal et des parties
  • le recours aux TIC pour que les experts puissent faire connaître en temps réel leurs disponibilités, pratiquer des échanges dématérialisés avec les parties, leurs conseils et les juges via une plateforme garantissant la confidentialité des échanges, la conservation des actions et des pièces, la certitude des dates de dépôt des pièces et de leur ouverture.

L’EEEI va adresser de premières observations qui seront complétées par celles de nos membres travaillant dans des systèmes où l’expert est désigné par les parties.

Il est  demandé dès à présent une  définition claire du champ d’application et une rédaction adaptée aux experts désignés par les parties si la CEPEJ souhaite couvrir tous les États membres et toutes les procédures d’expertise.  S’agissant des lignes directrices à l’usage des  seuls experts désignés par le tribunal,  il est apparu nécessaire d’insister sur la création d’un service de contrôle des expertises doté des moyens techniques et humains pour jouer pleinement son rôle et d’inviter les États à promulguer des procédures qui concilient mieux qu’elles ne le font actuellement le respect du délai raisonnable et le respect du principe de contradiction.

Il est suggéré enfin de remplacer le titre actuel par celui de « lignes directrices sur le respect du délai raisonnable dans les expertises judiciaires » afin de souligner que le non- respect des délais a des causes multifactorielles qui ne se limitent pas à un défaut de diligence de l’expert.

 

Alain Nuée

Magistrat honoraire, Président du comité d’orientation de l’EEEI